Non, je ne me suis pas mis à écouter du Zouk et à dancer le coupé-décalé en mode compétition. Non, je ne suis pas re-devenu noir (si, souvenez-vous, je vous ai déjà expliqué que j'étais noir et que j'écoutais du Hip-Hop dans ma jeunesse. Je suis devenu blanc plus tard, perdant en même temps et à tout jamais la possibilité de descendre en dessous des 30 minutes sur 10 kilomètres. C'est plutôt couillon, non ?).
Aujourd'hui, je vais faire du plagiat intellectuel. Ooooouh, pas bien, baisse les yeux. Ca n'est pas que je n'ai pas d'inspiration, ça n'est pas que j'ai la flemme, mais je viens juste de tomber sur un article d'un blogueur Sud-Africain, qui court parfois pieds nus, très souvent en T-Rockets, sandales minimalistes qu'il a l'honneur et l'avantage d'avoir créées et qu'il commercialise à l'intention des coureurs recherchant des sensations naturelles alliant une protection minimum pour la plante des pieds.
Andrew court donc minimaliste depuis 5 ans maintenant, et il a pondu à cette occasion un petit billet "Faisons le point et voyons où on en est 5 ans après" que je trouve très chouette. Je vais donc me permettre de le plagier honteusement, car il dit très bien et en 5 points clairs, nets et précis ce que je ressens moi-même au sujet de ma pratique du barefoot.
Pour ceux d'entre vous qui comprennent et/ou aiment la langue de Shakespeare, voici le lien :
I am at an age where my running will not easily get faster, but I have noticed it can get better. Almost 5 years into minimalist and sometimes barefoot running I thought it might be useful to take ...
http://sandalrunning.blogspot.fr/2015/06/barefoot-birthday-5-years-without-shoes.html
Andrew a 40 ans (comme moi). Et il faut avouer qu'arrivé à cet âge vénérable, on commence souvent à voir apparaitre les premiers stigmates d'un corps qui fatigue, qui commence à s'user, pour tout un tas de raisons : la machine fonctionne encore, mais plus on se rapproche de la cinquantaine, plus on se dit "Putain, on n'est plus tout jeune quand même !" à de multiples occasions.
Attention à ne pas en faire une généralité : il y a de nos jours énormément de coureurs quarantenaires voire plus qui non seulement courent, mais en plus bien (faut voir les chronos que font péter certains V1 et V2 sur des courses, que ça soit sur route ou en trail !), et en étant rarement voire jamais blessés. Mon poto Domi vient de passer V2, il aligne les kilomètres avec une facilité déconcertante, a battu son record sur 10 en début d'année, et n'est jamais blessé (juste une petite déchirure il y a 2 mois, à mon avis il est tranquille pendant 10 ans de ce côté-là). Mon buddy Vince a mon âge, et a couru les 160 bornes de l'UT4M l'été passé. Les coureurs de cet acabit ne connaissent pas leur bonheur, car s'ils sont certes nombreux, ceux qui, eux, à chaque jour les rapprochant de la cinquantaine, voient leurs performances décliner, commencent à avoir mal quelque part à chaque sortie ou presque, et se voient souvent contraints de se mettre au repos forcé pendant l'année à cause d'une blessure, sont encore plus nombreux, et garnissent régulièrement les salles d'attente des médecins et kinés.
Oui. Et alors ? On adore TOUS courir. Manquerait plus que l'on se tape des séances de fractionnés sous la pluie, le vent ou la neige alors qu'on n'en a pas envie. Manquerait plus également que l'on se lève le matin à 5 heures pour caser sa petite séance quotidienne avant d'aller au boulot juste pour se priver volontairement d'une heure et demie de sommeil. Cerise sur le gateau, il ne manquerait plus aussi que l'on s'inscrive contraint forcé à des courses à des bornes de chez soi, que l'on paye pour ça, que l'on glandouille 1/4 d'heure ou plus dans le sas à respirer (déjà) des odeurs de transpiration, à cotoyer des gars qui pissent tranquille dans une bouteille parce qu'ils ont déjà bu 2 litres avant le marathon (vécu à Paris), que l'on se mette la misère après pour viser un chrono que l'on n'est même pas sûr d'atteindre, pour enfin passer 10 minutes frigorifié et avec la gerbe pour récupérer ses affaires à la consigne, au milieu de gens qui puent encore plus que dans le sas de départ (logique). On ne parlera même pas de la démarche Playmobil pendant les deux jours qui suivent, et de l'impossibilité de descendre un escalier, nous forçant à l'aborder en marche arrière devant les collègues hilares.
Je vous ai vendu du rêve là, non ? Vous vouliez vous mettre à la course à pieds ? Dommage. Eh oui, il faut DEJA pratiquer la CAP pour comprendre tout ça..... Nous sommes et serons à tout jamais des incompris pour les non-pratiquants.
Donc, pour revenir à Andrew, dit-il n'importe quoi dans son article ? Non, pas vraiment. En annonçant qu'il aime courir, il n'annonce pas une évidence, mais nuance un peu la notion d' aimer "courir". Pour le citer, il dit se concentrer depuis 5 ans sur le plaisir que lui apporte la pratique, et non pas le plaisir que lui apporte la chaussure. J'apporte juste un petit bémol sur ce point, parce qu'il faut quand même avouer que courir avec LA paire de pompes qui propose les qualités requises (selon les besoins de chacun) à un bon run, ça peut faire toute la différence par rapport à une course avec du matos inapproprié. Par contre, toujours pour le citer et pour re-basculer sur la sphère barefootienne, il continue en expliquant que les chaussures nous coupent de certaines sensations, et aboutit donc à l'équation "Plus de chaussures = moins de bonheur" : là-dessus, j'aurais plutot tendance à le rejoindre.
Dernier élément, le changement qu'induit le barefoot amène forcément son lot de nouvelles expériences, chose non négligeable et qui peut éviter de tomber dans le train-train quotidien de l'entrainement formaté et répétitif.
2 ans de runnings minimalistes en image (le détail ici : http://www.drnicksrunningblog.com/two-year-long-case-study-demonstrating-an-increase-in-arch-height-from-running-in-minimalist-shoes/)
Le running minimaliste, et encore plus le barefoot, c'est donner à son corps l'opportunité de se ré-équilibrer, de pratiquer une activité exigeante et même parfois traumatisante de façon plus respectueuse. On est encore une fois synchros là-dessus, et y'a pas qu'Andrew et moi qui le pensons : je ne vais pas détailler à nouveau ici tous les bienfaits liés à la pratique, mais ils sont nombreux. La majorité des barefooteurs s'y sont d'ailleurs mis pour cause de blessures trop fréquentes, et ont vite vu les bénéfices que ça pouvait apporter (posture ré-équilibrée, moins de pression sur les articulations......), quitte à ce que ça soit au détriment de la performance.
J'en veux pour preuve une connaissance internautique qui tournait à 37' aux 10 kilomètres, et qui s'est mis au minimalisme et au barefoot pour toutes ces raisons : il fait maintenant ses sorties à 10 kilomètres/heure (c.a.d. à des années lumières de ce dont il était capable auparavant), se fout complètement du chrono, prend le temps de faire sa transition, et surtout trouve son bonheur là-dedans, en toute simplicité. Petit détail : plus de blessures. Forcément, certains vont dire qu'en courant à cette allure, il ne risque vraiment pas de se blesser. Mais quand il aura maîtrisé le truc, il pourra à nouveau hausser le rythme, et probablement se rapprocher des ses performances d'antan avec l'option zéro-casse/pas d'arrêt aux stands, et ça, ça n'a pas de prix.
Cet argument, je l'ai déjà avancé en long, en large et en travers sur ce blog (cliquer sur les liens surlignés pour les nouveaux-venus) : le barefoot interpelle, fait réagir, et une fois passé le moment de surprise, les gens se mettent spontanément à vous parler, et donc établissent le contact. Dans son article, Andrew compare ça à se pointer en short et T-shirt à une soirée habillée : ça en amuse certains, en intrigue d'autres et ça choque le reste, mais au final le contact est établi.
J'ai eu depuis que je cours pieds nus beaucoup plus de "rapports" (attention à ce que vous mettez derrière ce terme : non, pas CE type de rapports. Si c'était le cas, j'aurais commencé depuis belle lurette.....) que durant mon époque chaussée sur une période équivalente. Chaussé, lorsque l'on croise un coureur, on fait au mieux un petit signe de la tête et/ou on dit "Bonjour !" , avec en retour une réaction ou pas, car certains runners doivent avoir été élevés par des loups..... Je pense ici au "Grand con" que l'on a déjà croisé des milliers de fois par le passé avec Hervé, et qui n'a JAMAIS daigné répondre à un de nos bonjours, que ça soit à "domicile" ou sur une course à l'extérieur. Grand con, si tu me lis, tu es un goujat hautain doublé d'un autiste sans éducation, honte à toi. Et on te pisse à la raie. (Grand con, si tu sais où j'habite, c'est Hervé qui veut te pisser à la raie, pas moi. Moi, je te trouve trop cool. Et sympa aussi.)
Pieds nus, soit les gens sont surpris et font mine de nous ignorer, soit ils répondent timidement au "Bonjour !" lancé par le barefooteur jovial qui prend sa dose de bonheur en courant. S'ils ne nous ont pas interpellé la première fois, ça sera forcément lors de la deuxième rencontre, d'une façon ou d'une autre : soit ils lancent franchement la conversation, soit ils répondent au "bonjour !" avec un petit sourire entendu, genre "Ah oui, je me souviens, c'est vous !". Chaussé, ça n'arrive pas si souvent que ça, parce que le coup du "Ah oui, je me souviens bien de vous, vous portiez des runnings !", ça n'aurait aucune raison d'être (au mieux, ça sera "Ca fait au moins 15 fois qu'on se croise ici, incroyable non ?", ou encore "Bonjour mademoiselle, vous êtes charmante !", mais faut être obligatoirement charmante, et j'ai un peu de mal à être charmante. Pourtant je fais de mon mieux.). Du coup, de fil en aiguille, on sympathise, et à défaut de devenir amis au sens premier du terme, ça fait des connaissances toujours agréables à avoir pour la suite : au prochain run, on ne s'arrête plus pour poser ou répondre à des questions sur le barefoot (parce que c'est déjà fait), mais on fait un bout de chemin ensemble en parlant de choses et d'autres, et c'est parti mon kiki, l'été d'après, ce parfait inconnu devenu depuis notre meilleur ami d'enfance nous prête sa villa à Honolulu : le barefoot mène à tout messieurs dames, je vous le dis.
Si vous me croisez un des ces jours sur une course, je suis sûr que vous me regarderez bizarrement, et ça ne sera pas à cause des pieds nus.